« le rouge est resté la couleur de la séduction. Si ce n’est plus depuis longtemps la couleur préférée des hommes et des femmes, du moins dans le monde occidental - ce rôle est tenu par le bleu -, c’est encore une couleur fréquemment associée au plaisir, spécialement au plaisir des sens. Les bonbons rouges restent les préférés des enfants, de même que les jouets et ballons de même couleur ; les fruits rouges passent pour gorgés de vitamines et plus délicieux que tous les autres […]
Couleur du plaisir, le rouge est aussi celle de la joie et de la fête. Noël, par exemple, qui dans le calendrier prend place peu après le solstice d’hiver, associe le vert du sapin, le blanc de la neige et le rouge du Père Noël. Ce dernier ne doit nullement son vêtement rouge à une publicité des années 30 pour Coca-Cola, comme on l’affirme parfois, mais bien à saint Nicolas, protecteur et bienfaiteur des enfants, coiffé d’une mitre et vêtu d’un manteau rouge dans les images depuis la fin du Moyen Âge. […]
Mais il est bien d’autres réjouissances où le rouge est à l’honneur. Par exemple dans les spectacles, lorsqu’un rideau rouge se lève ou s’écarte pour dévoiler la scène dans un véritable rituel épiphanique. […]
Tel est aujourd’hui le paradoxe du rouge qui n’est plus notre couleur préférée, qui se fait de plus en plus discret dans notre environnement quotidien, qui en de nombreux domaines est devancé par le bleu, sinon le vert, mais qui reste symboliquement le plus fort. Étrange destin pour une couleur venue de si loin loin et tellement chargée de sens, de légendes et de rêves ! »
Michel Pastoureau, Rouge. Histoire d’une couleur.